On peut citer Corto Maltese, Dr. Justice, Gai-Luron, Placid et Muzo, les Pionniers de l'Espérance (pour les plus âgés), Dicentim... mais surtout et avant tout, les anciens lecteurs et même ceux qui n'ont pas vraiment vécu la saga Pif-Gadget connaissent et citent volontiers RAHAN, le fils des âges farouches !
Il y a de nombreuses raisons à cela (attrait toujours renouvelé pour la Préhistoire, figure emblématique du héros façon Tarzan, aventures exotiques, personnage positif et éventuellement icône sexuée plaisant également aux filles...) mais au moins DEUX raisons indiscutables peuvent expliquer la longévité du fils de Crâo au-delà de son géniteur scénaristique (Roger Lécureux est décédé il y a 13 ans) et de sa publication d'origine (Pif-Gadget a cessé de paraître en 1993, et la version ressuscitée au milieu des années 2000 ne proposait que des reprises assez anciennes du personnage) :
La 1ère, c'est le trait si caractéristique et dynamique d'André Chéret, et la 2nde, le fait que Rahan ait connu ses propres publications dès les années 70, et des éditions d'albums qui se poursuivent aujourd'hui.
Ci-contre : annonce pour la sortie du trimestriel Rahan.
Ce trimestriel connaîtra une magnifique série de couvertures épiques, et marquera le départ d'une vie parallèle pour Rahan, visible en kiosques indépendamment de Pif-Gadget.
(J'ai repris cette illustration du blog
http://vaillant-pif-gadget.over-blog.com,
dont l'auteur est un fondu absolu de Pif, Vaillant.. et Rahan, et qui propose régulièrement de magnifiques scans d'illustrations tirées de Pif-gadget ou Vaillant... Faites-y un tour de ma part !)
Je ne vais pas ici raconter toute la saga de Rahan pendant et au-delà des éditions Vaillant.
Je vous suggère d'aller explorer
le site officiel qui lui est consacré :
le site officiel qui lui est consacré :
Vous y trouverez TOUT : les albums, les gadgets, les adaptations en dessins animés, le projet de film...
Mais puisque mon documentaire évoquera longuement et de diverses manières la création de ce personnage et sa pérennité, l'inscrivant pleinement dans le projet éditorial de Pif-gadget (l'idée avait longtemps travaillé Roger Lécureux avant que la rencontre avec LE dessinateur idéal donne le départ à cette longue aventure), je livre quelques réflexions et pistes (déjà et souvent abordées ailleurs) :
Dans le petit film que je lui avais consacré à l'occasion du 40ème anniversaire de Rahan, André Chéret m'avait raconté à sa façon une partie de la genèse du personnage : notamment sa blondeur, étonnante pour un homosapiens de son époque, qui est certainement ce qui reste d'un autre projet de personnage que portait Chéret : un Gaulois blond, portant d'ailleurs un intéressant collier, pas très éloigné du collier de griffes de Rahan ! (cliquer sur l'image-titre pour visionner le film : )
L'époque de sa création - l'année 1968 - n'est pas innocente non plus, si l'on considère les aspirations d'une certaine jeunesse vers la liberté, le retour à la nature, etc...
(Rappelons que Rahan a été publié pour la première fois dans le 1er numéro de Pif-Gadget, le 24 février 1969... et a donc exactement le même âge que ce journal !)
Le succès de Rahan fut quasi-immédiat et fulgurant, à tel point que la rédaction de Pif-Gadget croulait sous le courrier de lecteurs réclamant plus d'aventures du personnage.
Or, depuis la création de la formule "tout en récits complets", Pif-Gadget proposait non plus des histoires à suivre indéfiniment à raison de 2 planches hebdomadaires, mais de grandes histoires de 20 planches (dans le cas de Rahan notamment) !
Pour accélérer la parution des récits de Rahan, en 1974, on a suggéré la création d'un atelier dans lequel André Chéret formerait un ou deux autres dessinateurs capables de l'épauler pour répondre à la demande.
Mais la direction de Vaillant, désormais tiraillée entre la créativité de la rédaction et les demandes pressantes de son service commercial, décida de faire dessiner de manière autonome quelques aventures de Rahan à l'italien Guido Zamperoni (qui signait Guy Zam), sans que Chéret en soit averti... D'ailleurs, le résultat déçut les lecteurs, qui ne retrouvaient pas la "patte" magique du créateur graphique qu'était Chéret.
L'espagnol Enrique Romero, formé lui par Chéret, réussit ensuite beaucoup mieux et ira jusqu'à calquer totalement les cadrages et le style général des bandes de Chéret..
(Le dessin ci-contre à droite est de Roméro... mais en cliquant dessus, vous tomberez sur un forum où un internaute très perspicace a trouvé où et comment le dessinateur a pompé sur son maître, histoire de bosser mieux et surtout plus vite... !)
L'apogée de Rahan et de son dessinateur : le prix Phénix en 1974. Les personnages de Pif-Gadget - et bien d'autres ! rendent hommage au personnage et c'est une lune de miel qui va rapidement se transformer en cauchemar pour le dessinateur, obligé de justifier son statut de co-créateur du personnage auprès de la direction des éditions Vaillant... 2 ans plus tard, la situation sera réglée, mais laissera quelques traces...
Les tracasseries juridiques qui s'ensuivirent pendant plusieurs années entre Chéret et les éditions Vaillant donnèrent raison au premier, et depuis cette époque, les dessinateurs ayant participé à la création d'un personnage partagent avec le scénariste une part des droits liés à ce personnage. (je simplifie à outrance car ce n'est pas le sujet ici).
Moralité : les éditions Vaillant savaient innover, promouvoir de belles idées et communiquer avec le public... autant qu'elles pouvaient se comporter comme n'importe quelle société commerciale dans le secteur de la presse, un brin d'opacité en plus.
(2 annonces parues dans Pif-Gadget alors que RAHAN étéait devenu le personnage le plus populaire du journal. Ici, pour 2 albums co-édités par Hachette et pour la parutions en version bimestrielle)
André Chéret ne souhaite plus revenir sur cette période (mais nous aurons l'occasion d'en synthétiser les tenants et aboutissants dans le film) et préfère nettement évoquer les aventures du héros qu'il a créé sous l'impulsion géniale de Roger Lécureux, son goût pour l'action et les mises en page "coup de poing", son souci du dynamisme...
Ci-contre : un épisode en 2 parties qui a marqué les lecteurs et - au-delà du "traumatisme médiatique" qu'a suscité cette "une" lugubre - il permit une fois pour toutes d'établir la popularité zénithale du personnage et l'attachement des lecteurs : il furent plus d'un million à s'arracher ce numéro 443 de Pif-Gadget, en 1977, et leurs appels frénétiques et massifs firent sauter plusieurs fois la ligne téléphonique des éditions Vaillant...
Au cours du film on le verra dessiner le personnage mais surtout, on découvrira l'étendue de l'amour que lui portent ses lecteurs, la dimension sociologique de sa naissance et de sa longévité, et quelques souvenirs des uns et des autres...
3 exemples pour montrer que le style Chéret, c'est avant tout le dynamisme du trait et du cadrage !
(cliquer pour agrandir)
(cliquer pour agrandir)
Jean-François Lécureux, fils du créateur de Rahan, s'est pris au jeu après le décès de son père en décembre 1999, et s'applique à prolonger la saga en promenant le personnage dans des sites donnant lieu aujourd'hui à diverses animations (musées de la Préhistoire, etc...) et permettant à Rahan de devenir au fil des ans la "mascotte" préférée des paléontologues et historiens cherchant à fédérer auprès d'un large public jeune les recherches sur la Préhistoire.
Sur mon blog général, j'avais raconté un week-end passé aux côtés d'André Chéret, dont j'avais tiré une vidéo tournée à Montbéliard et Audincourt, entre visite du musée de la préhistoire aux côtés d'un fondu de Rahan - le conservateur ! - et d'un festival de BD dont Chéret était la vedette.
Cliquez sur l'affichette pour voir cette page, les illustrations et les vidéos :
Une curiosité !
André Chéret a démarré très jeune, à la fin des années 50, et parmi ses premières illustrations, il y avait des travaux destinés par exemple à "Radar".
Illustration typique de l'époque, et dont Angelo Di Marco (qui devait travailler chez Pif-Gadget plus tard !) devint le spécialiste.
Chéret illustra par la suite, pendant quelques années dans Vaillant la série "Bob Mallard", qui l'enquiquinait un peu, car trop technique (la série des exploits de 2 aviateurs est truffée de machines et de "tôles", comme le dit Chéret lui-même, qui préfère la nature, les arbres et la vie sauvage !)
André et Chantal Chéret m'ont ouvert quelques-unes de leurs archives pour le film, et lors de ma dernière visite en novembre 2012, j'avais improvisé (avec mon appareil photo tout minuscule mais capable de faire de la vidéo de bonne qualité !) une petite conversation où André me montre des versions étrangères, un nouvel album de la magnifique collection de rééditions noir et blanc (un must !!!) et l'album "Les trésors de Rahan", où les nostalgiques pourront replonger dans les illustrations d'albums anciens, les gadgets, quelques anecdotes et des images magnifiques de l'histoire de Rahan.
Cliquez sur l'image ci-dessous pour découvrir André Chéret chez lui, présentant quelques nouveautés... :
EVENEMENT : ANDRE CHERET A ANGOULEME :
Cliquer sur la photo pour voir le blog illustré du reportage autour de Rahan, aux côté d'André Chéret lors du festival :
EN BONUS :
J'avais complètement oublié cette vidéo tournée lors du week-end à Montbéliard en 2010. André Chéret s'y amusait à dédicacer un album à son ami Gotlib... à sa manière. Un crime de lèse-coccinelle !!! :